Amours profanes
Dans l'univers gris, fait de routines, d'espoirs déçus et de rivalités mesquines d'une petite université américaine, cette année scolaire sera très différente des autres. Tout le monde en est persuadé. On a en effet invité St. Dennis le plus grand poète anglais contemporain. Et chacun va se disputer l'honneur de le recevoir, et (qui sait ?) de devenir son ami. Mais le vieil homme usé qui arrive d'Europe ne changera rien dans ce monde peuplé de pantins dérisoires. Même Brigitt sera déçue. Romancière remarquée quelques années plus tôt, Brigitt, elle aussi, est rongée par l'atmosphère de petitesse qui l'entoure. Et quand le hasard la réunit à l'un de ses collègues, musicien à la recherche de lui-même, c'est à peine si elle peut reconnaître l'amour. Le regard que jette Joyce Carol Oates sur cette petite société est ironique et impitoyable, et fait que cet univers de la banalité est drôle, que ce roman de la tendresse et de l'émotion est aussi souriant et acide. Où sont donc la poèsie, et tous ces grands sentiments inspirés par l'art dont tout le monde ne cesse de parler ? Tout cela au fond, n'est peut-être pas sérieux. Le tragique c'est sans doute que la vie, notre vie, dans ce qu'elle a de quotidien et de profondément touchant, n'a rien de tragique. Telle est la conclusion des "Amours profanes".