Les hommes de bonne volonté (Le Li... T1 - Le 6 octobre
LE 6 octobre 1908. Le petit matin. Soleil et fraîcheur. Le Paris des faubourgs descend ait travail. L'allure des gens. Leurs façons de s'habiller. Leurs préoccupations. grandes et petites. Le choléra: le métro: l'aviation ; le mouvement syndicaliste; le crime du jour. Mais surtout la menace d'une guerre balkanique. et peut-être d'une guerre
générale en Europe. ? Neuf heures. Des badauds regardent travailler. rite Montmartre. un atelier de peintres décorateurs où le jeune Wazemnies est apprenti. La jolie comédienne Germaine Baader dort dans sa chambre du quai des Grands-Augustins. ? Chez les Saint-Papoul. Madame donne des ordres. Monsieur se livre aux exercices
physiques, et Mademoiselle Bernardine à des lectures de piété. Chez les Champcenais. Madame reçoit les soins de la manucure; Monsieur a, au téléphone, une conversation énigmatique au sujet d'un membre du Parlement. ? Dans sa classe de Montmartre. l’instituteur Clanricard parle aux enfants des menaces de guerre européenne. En haut de Belleville, Madame Maillecoltin fait son ménage à loisir, - Sur la Rive Gauche. Juliette Ezzelin sort de chez elle. en proie à une profonde détresse. Tandis qu'au loin Jean Jerphanion rêve dans le train de Saint-Étienne qui l'emmène vers Paris. Peu après Juliette Ezzelin pénètre chez le relieur Quinette, à Vaugirard. pour lui confier un livre. Elle éprouve une impression étrange. En s'en allant. elle aperçoit dans un petit passage un homme bizarrement tapi contre un mur. – Ce même homme. quelques instants plus tard. fait irruption chez Qui nette. et demande à se laver : il a les mains, les vêtements tachés de sang. Quinette obtient que cet homme lui donne un rendez-vous pour le soir même, à six heures moins dix, rue Saint-Antoine. ? Pendant ce temps, dans l'atelier de Montmartre, le peintre Péclet exécute une grande composition décorative, et Wazemmes lit en cachette un manuel d'automobilisme. ? Onze heures et demie. Clanricard, que tourmentent les nouvelles de la crise balkanique et européenne, va chercher J'apaisement auprès de son mettre Sampeyre, avec qui il déjeune. Midi. Wazemmes part pour Enghien, porter aux courses les paris de ses camarades. Germaine Baader se réveille, pense à ses soucis, à son corps, à l'amour. Quinette fait un tour dans le quartier, pour savoir si l'on ne parle pas d'un crime commis dans le voisinage.
L'après-midi, Péclet poursuit sa besogne. Wazemmes, flânant sur le turf, est abordé par un monsieur de bonne apparence. Chez Germaine Baader, le repas se termine. Son amant, Gurau, le député, lui parle de la situation extérieure, et de son intention d'interpeller sur le régime scandaleux dont bénéficient les pétroliers. Dans son train, Jerphanion lit le journal, pense à l'époque et à la hantise de la guerre qui a pesé sur toute sa jeunesse. ? Quatre heures et demie. M. de Champcenais, pétrolier, en traversant le pont de Puteaux, se heurte à une foule de grévistes. Clanricard, sorti de son école, ne peut pas s'empêcher de frémir d'un obscur enthousiasme au passage d'un escadron. Le petit Louis Bastide entreprend avec son cerceau un merveilleux voyage jusqu'au sommet de la Butte. Cinq heures. Le soir commence à tomber sur Paris. Forme et grandeur de Paris. Lumières. Onze express accourent du fond des provinces. Paris étouffe dans son enceinte et sa banlieue. Le centre et sa palpitation.
Quinette va au rendez-vous de la rue Saint-Antoine. Il retrouve l'homme de ce matin, qui, par un itinéraire compliqué, l'amène au fond d'un petit débit du quartier juif. Quinette lui arrache à demi l'aveu de son crime, obtient q0elques détails mêlés de réticences, lui offre ses conseils, son aide. ? Devant la gare du Nord, Wazemmes est rejoint par le monsieur rencontré sur le champ de courses. Invitation au café. Le monsieur, Haverkamp, lui propose une place. ? Quinette suit le meurtrier inconnu jusqu'au refuge qu'il s'est choisi, rue Taillepain. Ils causent. Comment l’autre échappera-t-il aux recherches ? Comment retirer sa malle de l'hôtel où il l'a laissée ? Quinette trouve un biais. Mais un incident lui révèle la méchanceté foncière de l'inconnu. ? Wazemmes, en quittant l'atelier, prend l'autobus. Il y reçoit des signes d'attention flatteurs de la part d'une dame élégante. Descente de l'autobus. La dame invite le jeune homme à venir la voir, le soir même. Ils se quittent. Wazemmes, qui est encore vierge. rêve aux femmes, à l'amour, et à la dame de l'autobus. Il rentre chez son oncle Victor Miraud. L'intérieur, les goÛts, les habitudes de Victor Miraud. Sa conversation avec l'ébéniste Roquin. La porte aux battants sculptés. L'idéalisme ouvrier. Le jeune Wazemmes, ruisselant de parfum, va à son rendez-vous galant. Il est bien traité par la dame, mais ne perd point sa virginité. Il s'en retourne, en proie à une exaltation vive mais contradictoire, qu'il promène à travers les ombres et les lueurs d'un boulevard nocturne.