Le Jardin des Plantes
...J'ai fait plusieurs fois allusion ici même à une certaine allée du Jardin partiellement occupée à certaines heures par la pratique des deux grands jeux se jouant sur quadrilatère quadrillé, à savoir les dames et les échecs, soixante-quatre cases pour celui-ci, cent pour celui-là. Ayant déjà beaucoup parlé de cette allée au dames, je la laisserai en toile de fond en lui tournant le dos comme le conférencier sur scène dans un décor de square Louis XV.
Avant tout, exposer sinon régler la situation des dames par rapport aux échecs. Les échecs se jouent avec des pièces, figurines tournées ou sculptées, au pire moulées, chacune se déplaçant d'une manière différente. Aux dames il n'y a que des pions qui vont tous en diagonale et du même pas, sauf capture d'un ou plusieurs pions ; tout le monde sait ça, et par là même que le jeu d'échecs est plus compliqué que les dames. Il est très important de noter tout de suite que la complication d'un système, et surtout d'un système qui a sa fin en soi, n'en fait pas obligatoirement la supériorité. Elle ne peut d'abord inspirer l'admiration et le respect que d'un esprit naïf et superficiel ; le même pour qui le compliqué implique nécessairement le difficile. En conséquence, présumer à première vue que le simple est plus facile que le compliqué c'est encourir les plus graves déboires. Ce n'est pas dire que les échecs soient un jeu facile, loin de là, mais que les dames n'en sont pas moins difficiles. Le tout est de savoir en quoi et pour qui c'est plus facile ou plus difficile.