La Fin de la liberté
Qu'a de si politiquement incorrect Gore Vidal ? La Fin de la liberté montre avec calme et rigueur ? loin des termes pamphlétaires qu'on a pu lui assigner ? que les attentats américains étaient somme toute logiques, prévisibles, retour de bâton obligé d'une politique ultra-sécuritaire et protectionniste qui n'hésite pas ? confer la CIA ? à jouer les apprentis sorciers en finançant et voulant manipuler des individus comme Ben Laden. Pour Gore Vidal, il semble plutôt comique de se draper de vertu dans la bannière étoilée et de porter comme étendard les articles de la constitution de 1791 sur les libertés individuelles. Car, autre histoire des événements que Gore Vidal nous permet de comprendre dans son essai, il y a depuis cinquante ans un recul des libertés aux États-Unis. Il détaille comment les citoyens américains sont tous fichés par le jeu des cartes de crédit et autres inscriptions consuméristes en tout genre. Il explique aussi comment une paranoïa panique s'insinue subrepticement dans les consciences, à l'instar de ce photographe qui menaça l'auteur de le dénoncer à la police pour pédophilie, sous prétexte que ce dernier avait donné à développer des photos de vacances où il posait avec des enfants qui n'étaient pas les siens. L'Amérique marche-t-elle sur la tête ? Gore Vidal le pense intimement, lui qui annonce pour le XXIe siècle un changement d'ère caractérisé par le renforcement d'un état de sécurité nationale aux États-Unis, "dont le seul objectif est de mener des guerres perpétuelles chaudes, froides et tièdes". Moins connu et surtout moins traduit en France que Norman Mailer, son "féroce ennemi", Gore Vidal compte parmi les plus grandes figures littéraires des États-Unis. Âgé de près de 80 ans, défenseur éternel de toutes les libertés (son premier roman Un garçon près de la rivière paru en 1948 qui affichait clairement son homosexualité fit scandale), Gore Vidal est l'auteur de plus de vingt romans, de nombreuses pièces de théâtres, d'innombrables articles.--Denis Gombert