Vies parallèles de Roman Branchu
Il est bien évident que toute œuvre de fiction, si réaliste soit-elle, a pour cadre un univers parallèle. Roman Branchu, lui, a pour cadre l’ensemble de ces univers. Et s’il ne les mentionne pas tous (c’est impossible, malheureusement), du moins il les suppose. L’hypothèse de base est celle-ci : tous les possibles sont réels. Et voici le sujet : les différents destins qui se disputent le même personnage. Ce thème, une fois choisi, entraînait par ailleurs certaines conséquences du point de vue de la forme. Quand on passe d’un monde à l’autre, ce n’est pas seulement le destin du héros qui change : c’est aussi le ton de son histoire, et donc le style du récit. C’est ainsi que notre promenade à travers les possibles devient du même coup une promenade à travers plusieurs genres et techniques littéraires : essai, poème, chanson, conte de fées, journal intime, correspondance, dossier, dialogue, confession, autobiographie, roman d’aventures, parabole, satire, épopée... C’est ainsi que vous verrez naître et mourir la terre ; Roman Branchu venir ou ne pas venir au monde. Vous le verrez ensuite sauver un royaume, se laisser engluer dans le mariage ou, au contraire, y échapper ; devenir fou, devenir sage ; sauver la terre de la folie des hommes ; sauver la terre d’une catastrophe cosmique, et, pour finir, ne pas sauver la terre ; assister, impuissant, à la mort du monde, rester, quelques secondes encore, unique témoin de l’existence, avant l’extinction finale de l’esprit dans le cosmos, et du cosmos lui-même dans sa bovine, sa divine stupidité... Wagner voulait créer le théâtre total. Voici, dans le même ordre d’idées, une très modeste tentative de roman universel.