Le faubourg des Coups-de-Trique
Le faubourg des Coups-de-Trique : c'est ainsi que ses habitants avaient baptisé le quartier ouvrier de Belfort avant 1940, date où s'achève cette histoire, alors que les troupes allemandes font leur entrée dans la ville. En 1940, Théo a douze ans et il vient de passer, tant bien que mal, son certificat d'études. Demain, il ira gagner sa vie. Autour de lui, il y a ses grands-parents, chassés d'Alsace après la guerre de 1870. Il y a ses parents, sa soeur aînée, l'oncle Maximilien, séduit par l'idéologie fasciste, Kramsky, le coupeur de bois qui sait " parler hanneton ", et puis surtout Gentil, ancien marsouin, manutentionnaire à l'Alsthom, clarinettiste du samedi soir qui, ayant un jour entendu Artie Shaw à la radio, fait du jazz sans le savoir. A leurs côtés, tout un petit monde tente de survivre, entre les usines et l'épicerie-bistrot, à une existence de labeur, d'effroi et de désillusion que viendra seul illuminer le grand soleil de 1936. Cet univers pourrait se peindre en gris et noir. Par la grâce d'un regard généreux, Alain Gerber en brosse un tableau plein de lumière et de chaleur. C'est que, dans, les humbles destins de ses personnages, il découvre des joies et des richesses secrètes, l'inépuisable trésor des coeurs simples. A travers l'un, à travers l'autre, c'est tout le faubourg qui parle, hurle, murmure, chante à tue-tête, éclate de rire, raconte son passé et fait semblant de croire à son avenir. Cette voix multiple et unanime emplit la tête du petit Théo, tandis que la clarinette passionnée de Gentil l'invite à d'étranges voyages.