Un an dans la vie d'une forêt
Je marchai des heures dans la forêt. Ma progression était ralentie par la neige. Je cherchais un endroit qui me dirait : "Stop, c'est là." Un endroit où m'asseoir et observer, qui m'accueillerait au long de l'année, un carré de feuilles, de cailloux et d'eau, un espace d'un mètre de diamètre, équivalant en taille aux mandalas circulaires des moines tibétains. Il m'apparut juste après que j'eus suivi le vol d'un faucon au-dessus des arbres dénudés. Je n'eus pas une seconde d'hésitation : elle était là ma représentation symbolique du monde, au pied de ce rocher massif, enfouie sous l'austère robe de l'hiver. Je m'assis sur le bloc de grès plat, et me répétai les règles que je m'étais fixées : venir le plus souvent possible, y observer le jeu des saisons, garder le silence, ne rien prélever, ne rien déplacer, effleurer peut-être, et patiemment me fondre dans le microcosme.