OR, les lettres de mon père
Je n’ai jamais reçu de lettres de mon père, ni de son vivant, ni de sa mort, pendant quarante ans pas une lettre pensai-je à peine et doucement, sans remuer les lèvres de crainte de chasser par un frémissement le passé encore posé sur le coin de la table, les ailes à demi fermées encore pour quelques instants. Quelque chose de doux et de silencieux va s’en aller et ne jamais revenir.
Et voici devant moi entassées par centaines ses apparitions, je les vois respirer, sous la poudre de poussière des centaines de lèvres, et elles vont s’ouvrir, un geste de moi, elles vont laisser échapper la voix de mon père le vrai, celle dont je n’avais jamais vu les traits, le pas est vif, la courbe nette. […] Et maintenant modestes puissantes nombreuses elles attendent entassées dans le carton marque BébéConfort un geste de ma part, les recueillerai-je, les accueillerai-je, les lettres de mon père. » H.C.