L'autre cap
En me proposant de publier en livre ce qui fut d’abord un article de journal, Jérôme Lindon m’a donné à réfléchir l’alliance d’un hasard et d’une nécessité. Jusqu’alors, je n’avais pas prêté une attention suffisante au fait qu’un article, « L’Autre cap », visiblement assiégé parles questions du journal et du livre, de l’édition, de la presse et de la culture médiatique, avait certes été publié dans un journal (Liber, Revue européenne des livres, octobre 1990, n°5), mais dans un journal singulier qui tente d’échapper à la règle, puisqu’il est simultanément inséré, de façon inhabituelle, dans d’autres journaux européens et simultanément en quatre langues. Or, il se trouve, de façon apparemment fortuite, qu’un autre article, « La Démocratie ajournée », traitant au fond de problèmes analogues, et d’abord de la presse et de l’édition, du journal, du livre et des médias (dans leur rapport à l’opinion publique, aux libertés, aux droits de l’homme, à la démocratie – et à l’Europe) avait été lui aussi publié l’année précédente dans un autre journal qui fut aussi le même, à savoir Le Monde, et encore à part, dans le supplément d’un numéro singulier : le premier numéro du Monde de la Révolution française (janvier 1989) qui parut douze fois l’année du bicentenaire. Au-delà du partage des thèmes et en raison de cette situation (un journal dans le journal mais aussi un journal comme tiré à part), j’ai donc imaginé qu’il y avait quelque sens à replacer ces deux articles tels quels, côte à côte et sous le même jour. Le jour, justement, la question ou la réflexion du jour, la résonance du mot aujourd’hui, voilà ce que ces articles de journal gardent de plus commun – à leur date, au jour d’alors. Les hypothèses et les propositions ainsi risquées s’en trouvent-elles pour autant datées aujourd’hui, au moment où les problèmes du droit, de l’opinion publique et de la communication médiatique, entre autres, connaissent l’urgence et la gravité que l’on sait ? Au lecteur d’en juger.