Les Misérables - Auto Edition T5 - Jean Valjean
Les Misérables, de Victor Hugo (1862) De l'œuvre entière se dégage cette pensée sociale exposée dans la préface : « Tant qu'il existera, par le fait des lois et des mœurs, une damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers, et compliquant d'une fatalité humaine la fatalité, qui est divine ; tant que les trois problèmes du siècle : la dégradation de l'homme par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l'atrophie de l'enfant par la nuit, ne seront pas résolus ; tant que, dans certaines régions, l'asphyxie sociale sera possible ; en d'autres termes, et à un point de vue plus étendu encore, tant qu'il y aura ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci ne seront pas inutiles. » Le héros des Misérables est Jean Valjean, l'émondeur de Faverolles, condamné au bagne pour un pain volé, un jour que les enfants de sa sœur avaient faim. À titre de prologue, Victor Hugo nous présente un respectable évèque, Mgr Myriel (Bienvenu Miollis) dans lequel il a incarné toutes les vertus du catholicisme primitif. Un pauvre diable déguenillé, hâve, souillé de boue et de poussière, vient demander l'hospitalité à l'évêque. L'évêque l'accueille, le couche. Au petit jour, l'homme déguerpit, emportant quelques couverts d'argent laissés sur la table. C'est Jean Valjean. Saisi par les gendarmes, qui l'ont vu s'enfuir, il est ramené chez le prélat pour la constatation du vol, mais le digne homme, lui montrant les deux flambeaux d'argent de sa cheminée, lui reproche doucement de ne pas les avoir emportés, puisqu'il les lui avait donnés comme les couverts. Écrasé par cette générosité qui le sauve, le galérien prend les flambeaux et se jure d'être honnête homme. Une jeune fille, Fantine, a été abandonnée par son amant ; malheureusement, elle a un enfant, la petite Cosette. Pour subvenir à leurs besoins, Fantine est disposée à faire tous les métiers, mais repoussée de partout comme fille mère, elle est obligée de se livrer à la prostitution. Une dispute de la pauvre Fantine avec un imbécile qui lui jette de la neige dans le dos l'amène en présence du redoutable Javert, la police faite homme. Javert donne tort à la fille, tout naturellement, mais il se heurte alors à M. Madeleine, maire de la ville, qui, entré par hasard dans le bureau, a entendu toute la lamentable confession de Fantine, et qui, pris de pitié, prend sur lui de la faire relâcher. Ce trait impossible, un maire sauvant une fille publique, exaspère Javert et confirme des soupçons que d'autres faits ont déjà provoqués dans son esprit. M. Madeleine ne dissimule-t-il pas sous un faux nom une autre personnalité? Javert laisse deviner ce doute; ce qui trouble grandement M. Madeleine, puisqu'il n'est autre que Jean Valjean lui-même, et il se voit ainsi sur le point de perdre tout le fruit de dix ans de probité. Un autre incident vient le troubler plus profondément encore : il apprend qu'un malheureux, arrêté sous le faux nom de Jean Valjean, passe en ce moment même en cour d'assises. Le malheureux se demande s'il doit laisser s'accomplir la condamnation de l'innocent, condamnation qui assurera son avenir et affermira sa personnalité empruntée, et sans se décider, poussé par une sorte d'instinct, il se rend à la cour d'assises. Là, il voit le malheureux, propre image de l'ancien Valjean, balbutiant d'un air hébété des récriminations qui ne convainquent personne : on va le condamner. M. Madeleine se lève et déclare qu'il est Jean Valjean; il se fait connaître par ses compagnons de chaîne, appelés pour être confrontés avec le faux Valjean, et il est ressaisi avec joie par l'impitoyable Javert. Toutefois, on le laisse libre momentanément et il profite de ce répit pour assister à l'agonie de Fantine, qui meurt sur un lit d'hôpital. Il jure à celle-ci, dont il s'accuse d'avoir causé la mort en la chassant de son atelier, d'adopter sa fille, la petite Cosette et il parvient à s'échapper et à gagner Paris.