Mon livre surprise
Celestino avant l'aube
J'aime bien me promener la nuit quand il n'y a personne pour me voir.
Oui, ça me plaît parce que je peux marcher à cloche-pied. Prendre mes aises à la cime d'un arbre et danser dessus, et faire des cabrioles. Et trente-six singeries, toutes différentes. Me rouler par terre et me remettre à courir, avant de me perdre dans le brouillard et entre les branches des hijillos qui restent encore debout. J'aime être tout seul et me mettre à chanter. Celestino s'est approché de moi et m'a demandé une gorgée d'eau.
" Où la prendre ? Où ? " lui dis-je, et je lui montre mes mains vides. Mais, en vérité, c'est que j'ai très mauvaise mémoire et que je n'arrive jamais à bien apprendre une chanson. Mais ça n'a pas d'importance - j'en invente. Je préfère presque les inventer plutôt que de les apprendre par cœur. Ça y est, je suis en train d'en inventer une. " Celestino, le cousin du narrateur, s'est mis à écrire des poésies.
Comme un fou, il écrit sans arrêt, partout, même sur les feuilles des arbres, même sous l'orage. Incompris des membres de sa famille, il s'entête malgré leurs cris et leurs menaces. Il ne sait rien faire que rêver et pleurer. Petit paysan cubain, il se dresse contre un monde qui essaie de le foudroyer. Voué à la douleur, à la mort - de faim, de tristesse, de solitude -, il transfigure le réel avec magie pour la défense de la liberté et de l'imagination. Celestino avant l'aube, publié à Cuba en 1967, constitue le premier volet d'une pentagonie, qui compte les romans : Le Palais des très blanches mouffettes, Encore une fois la mer, La couleur de l'été et L'Assaut.
"Celestino antes del alba" (1967) traduit en français en 1973 sous le titre "Le puits" (éd. le Seuil) Nouvelle version parue en 1982 sous le titre "Cantando en el pozo" traduite en français "Celestino avant l'aube" (éd. les 1001 nuits).