Un silence de fer
Août 1990, sur la route de Nuoro en Sardaigne, un jeune couple est sauvagement assassiné, les deux corps sont “joliment allongés” à côté de leur voiture immatriculée à Bologne. Le même jour, dans la pinède de Nuoro, un gitan est retrouvé carbonisé dans une poubelle. Une enquête difficile commence pour le juge Corona. Ce qu’il ignore, c’est que les deux meurtres, de même que l’enlèvement d’un jeune Toscan dans sa villa de la Costa Smeralda, sont obscurément liés à un attentat manqué dix ans auparavant : l’indépendantisme qui animait alors les esprits est encore au goût du jour, et les protagonistes de l’époque ont repris la lutte; une série d’épisodes s’entremêlent, de vieilles passions ressurgissent et influent sur les événements actuels. C’est au juge Salvatore Corona que revient la tâche de résoudre ce véritable embrouillamini, cet étrange et dangereux mystère refoulé dans les profondeurs archaïques de la terre sarde qui provoquera encore d’autres morts, tout aussi obscures. Ainsi Marcello Fois, mêlant l’horreur, la tension du “noir” et les déceptions ou les erreurs d’une génération qui finit par se trahir elle-même, nous fait admirablement comprendre la spécificité du terrorisme sarde : parent proche de la lutte politique italienne, des Brigades rouges etc., celui-ci est en effet profondément marqué par le banditisme, féroce et sanglant. A cette barbarie, la Sardaigne répond en développant un fatalisme collectif qui transforme ce roman en véritable tragédie. A travers de brèves descriptions des paysages mais surtout des mentalités sardes, l’auteur nous plonge dans un monde où la modernité venue du continent se heurte sans cesse aux traditions ancestrales, à un archaïsme qui refuse de mourir. Les rapports de deux meurtres, celui d'un jeune couple et celui d'un gitan, arrivent sur le bureau du juge d'instruction n'apportant que des détails insignifiants. Certes, comment pourrait-on deviner les étranges échos qui relient ces meurtres à une histoire de terrorisme vieille de dix ans ? Pour le comprendre, il faut pénétrer le profond mystère qui enveloppe la Sardaigne, terre de violence…