Il sourit à son image reflétée par le miroir, derrière le bar, et se plongea dans la méditation.

Avec quarante-deux mille dollars, il pourrait boire la meilleure marque de whisky, se saper comme un prince, être réellement ce que, à cet instant précis, ils croyaient qu'il était.

Quarante-deux mille dollars. Il était seul à savoir qu'ils étaient presque à portée de la main.

Quarante-deux mille dollars. Plus jamais il ne lirait l’avenir dans les paumes moites de tous ces imbéciles.

Quarante-deux mille dollars. Une garçonnière, des femmes aussi belles, aussi sexy que Maybelle. Mais plus intelligentes et plus cultivées.

Quarante-deux mille dollars. Tous les livres et tous les disques qu’il avait toujours voulu avoir. Tout le whisky irlandais qu’il voudrait ou pourrait boire, pourvu que Dieu lui prête vie.

Une condamnation à l’hédonisme à perpétuité !

Si... s’il pouvait répondre à la question à quarante-deux mille dollars : où? »

Voilà ce que rumine Doc Magus. Il sait que les quarante-deux mille dollars sont cachés quelque part dans le champ de foire où il exerce le peu lucratif métier de diseur de bonne aventure... mais comment les trouver ? Ce n’est pas sa boule de cristal qui le lui dira. Il en devient maboul (de cristal !), d’autant que les cadavres s’accumulent sur le chemin de ces quarante-deux mille dollars...