Le souffle
En ce coin du monde, au début de l'après-midi, il n'était que souffle et bruissements. J'avais encore atteint souverainement à la solitude. Et l'air déchaîné en sa substance lumineuse et puissamment soulevée m'isolait de la déception et de la menace que j'avais voulu fuir. J'éprouvais une soudaine ivresse à forcer l'immense brise marine dont je crus saluer enfin la défaite à l'extrémité du boulevard, devant l'Océan libre. Le souffle et moi nous sommes restés tous deux debout. " Le narrateur arrive " en ce coin du monde " afin de retrouver les traces de son ami Dag venu se suicider là un an auparavant. C'est son itinéraire chaotique et accidenté depuis la gare jusqu'à l'hôtel de la Baie, s'ouvrant sur la plage où est mort Dag, que met en scène ce récit inédit de jean Reverzy. Première version du Corridor (paru en 1958), le Souffle s'impose non seulement comme un document littéraire - ce qu'il est - mais surtout comme le récit halluciné d'une folie, comme une plongée dans la paranoïa d'un homme oubliant l'objet premier de sa quête pour se recentrer sur ses propres illuminations.