Le monde comme il ne va pas

Gilbert Keith Chesterton

Le monde comme il ne va pas
(1994)
206 pages
Popularité
Popularité du livre : faible
Notes
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3.62
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Pourquoi le monde ne va-t-il pas aussi bien qu'il pourrait aller ? Question incongrue à l'aube du XXe siècle, alors que la fièvre romantique et les fumées de l'industrialisation se sont alliées pour jeter sur notre univers le voile sombre d'une laideur sans espoir de salut. Valait-il la peine de s'interroger sur les maladies concrètes qui rongent l'humanité ? Valait-il la peine de se pencher sur un malade aussi répugnant ?

Au sortir d'une époque de pessimisme « professionnel » parmi les poètes et les penseurs, G.K. Chesterton, avec la truculence qui lui est propre, renverse la lorgnette. En ce pamphlet truculent qu'est Le Monde comme il ne va pas, il s'emploie à déchirer le voile de faux-semblant, de sottise, de snobisme, qui recouvre sa société anglaise et l'empêche de respirer. Son diagnostic, s'il fallait le résumer, serait le suivant : si tout va mal, c'est que rien n'est à sa place. Chaque courant de pensée moderne est une machine qui déracine l'individu, qui le fait sortir de ses gonds et le projette de côté ou vers l'avant, mais jamais ne lui permet de se confronter à ses aspirations naturelles.

Des illustrations, Chesterton en trouve dans tous les domaines : la classe démunie à qui l'on ôte sa plus simple dignité en lui prêtant des goûts et des ambitions qu'elle n'a pas ; l' « aristocratie » progressiste qui n'est plus qu'un Gotha de l'argent vite gagné ; la « suffragette » qui sacrifie les avantages naturels de la féminité pour s'aligner servilement sur le conformisme de l'homo politicus ; l'éducation moderne, qui fait du cynisme une vertu obligatoire...

En promeneur jovial égaré dans une époque disgracieuse, Chesterton soulève nonchalemment, du bout de sa canne, des pierres au bord du chemin, pour les laisser retomber aussitôt, emporté vers d'autres horizons par sa pensée caracolante. Mais, sous chaque pierre, le lecteur a eu le temps d'entrevoir un gouffre nouveau, que seul un magicien d'une folle perspicacité pouvait lui dévoiler. Une promenade avec le verbe enivrant de Chesterton, c'est une école de clairvoyance, mais aussi une leçon d'amour et de pitié devant ce pauvre monde qui, sordide ou plaisant, reste notre berceau et notre seule maison.

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