De quelques frontières
J'ai dit le moment d'enfance où la frontière du monde sensible s'arrête à la bordure du paysage, au-delà de laquelle, s'il me vient le désir de la franchir, il me sera impossible de revenir avant la nuit à la maison, ce qui est chose impensable. Je contemple les lointains de collines et de champs, des bois déjà embrumés par l'approche du crépuscule, la lente et minuscule progression des troupeaux lointains vers les étables qu'on éclaire déjà, les nuages longs au ventre soudain rosé tout au bout de l'horizon, et je tourne le dos à tout cela, en soupirant de ne connaître cet ailleurs que par le regard, et je m'en reviens en courant vers mon pays familier, vers ma maison.