De ce côte-ci de la mer
Erri De Luca dit de lui qu’il chante même quand il parle. Clin d’œil amical entre compères. À lire De ce côté-ci de la mer, texte écrit à l’approche de la mort, on sait désormais que Gianmaria Testa chante aussi quand il écrit. Alors qu’il se sait condamné et sans jamais y faire allusion, le chef de gare et auteur-compositeur-interprète ose le récit, une prose légère qui, comme la chanson, court de lèvres en lèvres et se fredonne au-delà des frontières. Gianmaria Testa se raconte au travers des autres, donne en partage des rencontres, paroles ou regards échangés, sonde quelques souvenirs d’enfance, le père, la mère, l’attachement à la terre et au labeur, ses racines.
Mais l’homme du Piémont embrasse avant tout la Méditerranée, cette mer où depuis trop longtemps dérive et se meurt notre humanité. Le voici en compagnie d’hommes, de femmes, « oiseaux migrateurs » d’un genre très contemporain, contraints à l’exil, l’abandon, la mort. Pour eux, le chanteur réinvente des moments de dignité. Gianmaria Testa puise ses forces dans le sourire d’une femme, dans la lumière pétillante des yeux d’un gamin, et dans la radicalité d’une lecture. Il mate la mélancolie et cherche sans cesse sous le chaos du monde, la douceur et la beauté. L’amitié, il la vit pleinement, il recompose la loyauté et donne des ailes à la solidarité. Il fait de l’écriture une mélodie, et du silence, une réconciliation. Gianmaria Testa, voix grave enroulée de tendresse, chante l’espoir et nous invite à l’imaginer avec lui : « J’ai foi en l’humanité » écrit-il dans son dernier texte. Quatre mots tout bêtes, tout simples, qui, dans notre collection, claquent comme une bannière.
Danièle Valin, traductrice en français d’Erri De Luca et de la totalité des chansons de Gianmaria Testa poursuit ici son œuvre de passeuse avec une délicatesse où respire la fraternité.