Vies privées
L'enfance est de plus en plus protégée. Les multiples formes de maltraitance sont de mieux en mieux dépistées. En quelques années le mur du silence, dans les familles comme dans des institutions, s'est largement effrité. On ne pourrait que se féliciter de cette évolution des mœurs si elle n'était elle-même porteuse de nouvelles formes de violence. La victimisation des enfants s'accompagne en effet trop souvent d'une diabolisation des "mauvais parents". Dans l'opinion publique, bien sûr, mais malheureusement aussi dans les institutions d'accueil où sont placés les enfants ou encoreà travers les décisions de justice.Comme on le sait depuisÀ corps et à cri, Caroline Eliacheff, psychanalyste et pédopsychiatre, travaille avec des nourrissons et de très jeunes enfants dans une pouponnière de l'Aide sociale à l'enfance. Confrontée quotidiennement aux effets ravageurs de la violence parentale, elle témoigne dansVies privéesdes conséquences destructrices de cette stigmatisation des parents fautifs. C'est ajouter au malheur d'un enfant que de lui retirer symboliquement son père et sa mère en le traitant comme un orphelin. Protéger l'enfant maltraité sans disqualifier la fonction parentale dont tout être a besoin, voilà la voie difficile qu'il faudrait savoir suivre. Parce qu'une vie ne saurait être privée de ses origines, l'auteur dénonce également les conditions dans lesquelles l'accouchement sous X est pratiqué en France.--Émilio Balturi