Une autre science est possible
Comme le fast food, la fast science, c’est vite fait, pas bon et pas très digeste ! Le compromis qui a longtemps assuré aux chercheurs le minimum d’indépendance vitale est mort. L’économie de la connaissance est dépendante des intérêts privés. Une économie spéculative – avec ses bulles et ses krachs – s’empare de la recherche scientifique. Les chercheurs doivent intéresser des « partenaires » industriels, participer aux jeux guerriers de l’économie compétitive. Les mots d’ordre comme « Sauvons la recherche » font consensus, alors qu’ils ne posent surtout pas la bonne question : « de quoi faut-il la sauver ? » Isabelle Stengers montre comment la science changera si les chercheurs cessent de se prendre pour le « cerveau pensant, rationnel, de l’humanité » et refusent que leur expertise serve si souvent à faire taire l’inquiétude de l’opinion. Un plaidoyer pour la slow science auquel répond, en miroir, et à un siècle de distance, un brillant pamphlet du philosophe William James, Le poulpe du doctorat (1903).