Ubu roi - Ubu enchaîné

Alfred Jarry

Ubu roi - Ubu enchaîné
191 pages
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Popularité du livre : faible
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Quelle fuite ! Quatre jours de course effrénée à travers la Pologne, sans un instant de répit ! Elle, qui fut reine de tout le pays, la voici contrainte de chercher refuge dans les tanières des bêtes fauves ! N'est-ce pas un ours qui ronfle là-bas au fond de cette caverne ? Elle guette les ténèbres et reconnaît avec soulagement la masse imposante de son auguste époux, le roi Ubu! Il a fui lui aussi, vaincu par les sbires de Bougrelas, l'héritier légitime de la couronne. La Mère Ubu regardé avec mépris «son gros polichinelle de mari». Si elle avait été seule à régner, le trône serait toujours en sa possession ! Mais qu'a fait ce fantoche imbécile, sinon accumuler les erreurs ? Il ne lui a pas suffi de persécuter la noblesse en inventant l'atroce supplice de la «trappe à nobles» où les condamnés sont décervelés, il a accablé d'impôts le peuple et les bourgeois. Même les morts devaient payer ! L'or et le sang ont enivré ce rustre ! Sa férocité n'a eu d'égale que sa gloutonnerie. Ubu est la caricature du pouvoir aveugle et borné. Il incarne la bêtise humaine darts toute son horreur. Sa digne moitié ne vaut guère mieux : elle fomente l'assassinat du roi Venceslas, leur bienfaiteur, et ne songe qu'à se remplir les poches. L'a-t-elle grugé, ce pauvre niais d'Ubu! Le voilà qui grogne et fait mine de se réveiller. Que dit-il ? «Attrapez la Mère Ubu, coupez les oneilles !» La reine déchue recule prudemment... On ne sait jamais quel délire peut soudain s'emparer de ce fou!

Ubu Roi tient à la fois de la farce enfantine et de la satire la plus noire. Ce théâtre de marionnettes n'est que le reflet démesurément grossi de nos peurs et de nos pires instincts. Aux « merdre ! » retentissants qui ponctuent la pièce comme une devise, on ne peut s'empêcher de Roi rire. Mais derrière les facéties de potache de l'auteur, son goût du scandale, on discerne une inquiétante vérité. Certes, le pouvoir n'est pas à mettre entre toutes les mains, mais une sinistre égalité met bien souvent au même rang le prince et le forçat. C'est ce que démontre la suite d'Ubu Roi, Ubu enchaîné.

Devenu esclave «pour être égal à tout le monde», Ubu se transforme une fois encore en assassin : la servitude lui permet d'ourdir impunément ses crimes. Car l'important, pour ce fantoche sanguinaire, c'est de «tuer tout le monde »...

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