Si c'est ma femme, je suis pas là
Appelons-la Claire, Moune ou bien alors Bénédicte. Elle est prof de lettres, agent immobilier ou agricultrice bio. Elle corrige des copies, fait du sport ou essuie des verres derrière un comptoir. Elle porte des bottes en caoutchouc, des talons hauts, des sandales. Elle a trente ans et attend un enfant. Elle en a cinquante et n'attend plus grand-chose. Elle a de l'ambition, des exigences et de l'autorité sauf quand elle a renoncé à tout. Elle est naïve. Elle est souvent cruelle. Elle est à moitié dingue ou peut-être trop raisonnable. Elle est fragile comme le verre et aussi tranchante que l'arête d'un silex. Elle peut se faire tuer. Mais elle est aussi capable de tuer. Donnons-lui un joli prénom. Clotilde ou Juliette. Lui ne sait plus comment il s'appelle. Il court. Il court après elle, après ce qu'il pense être sa proie, il court après des ombres, il ne cesse de courir, courir jusqu'à plus soif, jusqu'à bout de souffle, jusqu'au précipice. Il n'a pas encore compris, comme dit la chanson, que les histoires d'amour finissent mal, en général. Elles vont se charger de le lui faire bien comprendre.