On connaît l'histoire de Saül et de David telle que la Bible la relate dans le Livre de Samuel et les Chroniques : le peuple d'Israël réclamant d'être gouverné comme les autres peuples par un roi, Samuel choisit Saül venu dans la région à la recherche des ânesses égarées de Kis, son père. Le règne de Saül n'est qu'une longue lutte contre les philistins, au cours de laquelle il perd la faveur de Dieu. Vieilli, " agité par un mauvais esprit », il suit le conseil de ses serviteurs et prend le jeune David comme joueur de harpe pour se distraire. David tue le géant Goliath et se fie d'amitié avec le fils de Saül, Jonathan. La gloire qu'il acquiert à la guerre éveille la jalousie de Saül autant que le fait de le savoir choisi par Samuel pour lui succéder.

Télescopant quelque peu la chronologie, André Gide relie l hem de la rencontre à celle du dénouement, montrant Saül séduit par la grâce de David et perdu par ses démons auxquels il ne sait pas résister.

Cette pièce, Gide le précise dans une lettre au pasteur Eugène Ferrari, a été écrite " en manière d'antidote ou de contrepoids » sua Nourritures terrestres, achevées peu avant en 1897, et veut démontrer comment la passivité devant les tentations dissout une personnalité.

Ainsi par le biais d'un thème historique à peine déformé pour les besoins dramatiques, Gide - une fois encore et comme par antiphrase - traite d'un sujet où est engagé tout son être et Saül complète le portrait de cet homme lucide, décidé à goûter 'tous les plaisirs sans pour autant se perdre.