Poétique de la relation
Esthétique de la terre ? Dans la poussière famélique des Afriques ? Dans la boue des Asies inondées ? Dans les épidémies, les exploitations occultées, les mouches bombillant sur les peaux en squelette des enfants ? Dans le silence glacé des Andes ? Dans les pluis déracinant les favelas et les bidonvilles ? Dans la pierraille et la broussaille des bantoustans ? Dans les fleurs autour du cou, et les ukuléles ? Dans les baraques de fange couronnant les mines d'or ? Dans les égouttoirs des villes ? Dans l'ivresse des consommations aveugles ? Dans l'étau ? La cabane ? La nuit sans lumignon ?
Oui. Mais esthétique du bouleversement et de l'intrusion. Trouver des équivalents de fièvre pour l'idée "environnement" (que pour ma part je nomme entour), pour l'idéee "écologie", qui paraissent si oiseuses dans ces paysages de désolation. Imaginer des forces de boucan et de doux-sirop pour l'idée de l'amour de la terre, qui est si dérisoire ou qui fonde souvent des intolérences si sectaires.
E. Glissant