Pierre Lazareff ou le vagabond de l'actualité
Pierre Lazareff. Un nom mythique qui, entré dans la mémoire collective des Français, symbolise aujourd'hui encore la grande presse de qualité au point d'être toujours présent à l'esprit des lecteurs, même Ceux nés après sa disparition !
Le Paris-Soir de l'avant-guerre, le France-Soir «lu aussi bien au Quai d'Orsay que chez Renault » qui domina les années soixante, « Cinq Colonnes à la Une », premier grand magazine télévisé, populaire au point de vider pendant dix ans les rues de l’Hexagone à l'heure de sa diffusion, : c'était lui.
Qu'il ait été, des Années folles à nos jours, l'archétype du journaliste né sous la plume de nos meilleurs romanciers n'a rien d'étonnant, car sa vie fut un roman.
Petit-fils d'un des survivants de l'héroïque charge des cuirassiers de Reichshoffen, fils d'un émigré juif russe fuyant les persécutions antisémites et naturalisé français bien avant sa naissance, Pierre Lazareff fut le témoin privilégié de tous les grands événements du siècle et souvent le confident de leurs acteurs.
Dès la communale, au pied de la butte Montmartre, ses copains étaient Annabella, Ray Ventura, Marcel Bleustein-Blanchet, Jean Gabin ou Jean Effel, tous promis à Un avenir glorieux. Le Tout-Paris politique, artistique et mondain rechercha sa compagnie pendant quarante ans. Intime du président de la République Georges PompidoU et du Premier ministre Jacques Chaban-Delmas, « Pierrot », détenteur d'un pouvoir sans précédent dans l'histoire de la presse, marqua son époque pour avoir scrupuleusement Suivi trois préceptes dictés par Christophe, créateur de l'inoubliable Sapeur Camember – « Jeune homme, n'oubliez jamais que les gens sérieux ne sont jamais graves et les gens graves jamais sérieux » —, et par le père de Rouletabille, Gaston Leroux — « Le journalisme c'est voir, savoir, savoir faire et faire savoir » sans jamais oublier que « le premier devoir d'un journaliste c'est d'être lu ». Ils devaient lui ouvrir les portes de la plus eÎptionnelle réussite, même si le bonheur fut rarement au rendez-vous.
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Yves Courrière, né en 1935, prix Albert-Londres 1966 pour ses grands reportages et prix Chateaubriand pour l'ensemble de son œuvre (La Guerre d'Algérie, Joseph Kessel, Roger Vailland, etc.) s'est passionné pour ce personnage hors du commun.