Les jours viennent et passent
Je me suis longtemps tenue à l'écart de la littérature africaine, j'y lisais une injonction qui ne me convenait pas. Les auteurs étrangers parlaient à un «moi» intime, eux convoquaient la couleur de ma peau, ainsi qu'une Histoire qui me blessait et m'humiliait. J'étais une femme sensible, en proie aux remous de la vie, pas un concept, un combat perdu, un territoire à conquérir, une authenticité à redéfinir. Mon identité ne faisait aucun doute à mes yeux, ou si doute il y avait, leur imaginaire peinait à en restituer la complexité. » Au soir de sa vie, Anna se remémore son existence mouvementée dans un Cameroun en pleine mutation. À ses côtés, sa fille unique, Abi, qui a choisi de vivre en France, tente de dénouer ses propres conflits, d'accorder vie amoureuse et responsabilités familiales. Une toute jeune femme, Tina, rescapée des camps de Boko Haram, mêlera sa voix et sa destinée aux leurs. À travers ces trois générations de femmes, Hemley Boum embrasse, en un même élan romanesque, à la fois l'histoire contemporaine du Cameroun et l'éternelle histoire du coeur humain. Dans ce roman d'une grande puissance narrative, où l'on glisse aisément du présent au passé, de Paris à Douala, des années cinquante à nos jours, Hemley Boum aborde avec justesse et lucidité les questions de la transmission et de l'identité. Si les voix des femmes portent l'histoire, les hommes ne sont pas en reste : Max, le fils métisse d'Abi, représente, avec Tina et ses amis de Douala, une nouvelle génération, confrontée au pire mais habitée par l'espoir du meilleur.