Les Orphelins de Brooklyn
Lionel Essrog a grandi avec ses copains à l’orphelinat de Brooklyn. Adulte, il est embauché par un « privé », Franck Minna, dont l’agence se livre à de louches activités. Les orphelins de Brooklyn raconte l’histoire de ce groupe de garçons, les « Minna Boys », de leurs arnaques et combines variées, du meurtre de Minna et de l’enquête rocambolesque qui s’ensuit. C’est aussi une merveilleuse ballade dans le Brooklyn de Jonathan Lethem, dont la poésie n’a rien à envier à Paul Auster. Mais le véritable intérêt de ce livre est ailleurs : en effet, Lionel Essrog est affligé d’une maladie rare, le syndrome de Gilles de la Tourette, consistant en une série de troubles obsessionnels compulsifs (TOC) qui font de sa vie un enfer. Son principal symptôme se traduit par des éruptions verbales incontrôlées et il faut ici saluer le travail remarquable du traducteur, Francis Kerline, qui a su transposer en français des déformations linguistiques inouïes : on pense à Queneau, à l’Oulipo, à Harry Matthews. Du grand art. Dans ce roman noir en forme de comédie, Jonathan Lethem démontre que l’humour, et surtout la fantaisie, sont les qualités premières de cette génération d’auteurs qui succède aux « post-modernes ».