Le bel âge
L’action de ce livre se déroule dans une petite ville du pays d’Artois, au début du siècle. Cette ville, que l’auteur nomme simplement B..., prête au récit son décor et une couleur feutrée extrêmement particulière. Mais, à la différence d’autres cités illustrées par des romans de mœurs provinciales, B... n’est pas seulement un lieu et un cadre : elle est un personnage. Elle est même le personnage le plus important du récit. Sensuelle et puritaine, avide, étouffante et étouffeuse, elle tolère mal que quiconque vive en dehors de ses lois. Tout cela fait que ses habitants passent leurs journées dans un qui-vive assez excitant et que, toutes proportions gardées, la vie n’y est guère plus sûre qu’en première ligne : « Il serait trop simple d’être irréprochable, dit le narrateur. Celui qui veut survivre doit avoir l’œil partout et garder sans cesse le doigt sur la gâchette... » Pour lutter avec quelque chance de succès contre l’extraordinaire puissance de mort que représente la petite cité tranquille, il faut posséder le génie innocent d’une jeune femme vivante : celui de cette Madeleine, qui débarque un jour d’avril sur le quai de la gare de B..., avec sa valise de carton et son chien.