La matière-espace-temps
Une révolution bouleverse la science: à la recherche des particules élémentaires, la physique quantique découvre de nouvelles briques fondamentales de la matière, les quarks et les leptons; mais plus encore, elle fournit le cadre conceptuel qui permet de penser l'élémentarité.
L'édifice de la physique classique qui gouverne notre vie quotidienne est fortement remis en cause par l'apparition, au niveau microscopique, de rapports insoupçonnés entre la matière, l'espace et le temps.
Se laisser guider par Gilles Cohen-Tannoudji et Michel Spiro, c'est pénétrer dans un univers autre et pourtant aussi réel que le nôtre: les quarks y ont du charme, de la beauté et de la couleur; l'univers y est en expansion; les phénomènes n'y sont plus des objets en soi, mais des réalités expérimentales construites et élaborées; d'ailleurs la réalité elle-même n'y est plus indépendante de l'observation puisque celle-ci en perturbe irréversiblement les éléments qu'elle étudie; on y conçoit l'espace-temps comme un milieu matériel dont les propriétés varient selon l'échelle d'observation mais qui seul permet de comprendre la logique objective de l'élémentarité; les propriétés de symétrie y sont le fil conducteur.
De l'infiniment petit des particules à l'infiniment grand des structures de l'univers, ce fascinant monde quantique est bâti par une ambition hier encore jugée folle et utopique: unifier un jour en une théorie unitaire toutes les particules et les interactions fondamentales (gravitationnelle, électromagnétique, nucléaire forte et nucléaire faible) de la matière.
Déjà la physique des particules peut aujourd'hui reconstituer l'histoire de l'univers jusqu'au milliardième de seconde qui suivit la naissance de celui-ci. Elle est au seuil de l'état d'origine où la matière était indifférenciée.
Le silence des espaces infinis a cessé de nous effrayer.Gilles Cohen-Tannoudji, prix Thibaud 1971, est physicien théoricien au CEA à Saclay. Il est rattaché depuis 1983 au département de physique des particules élémentaires; il enseigne à l'Université de Paris XI-Orsay et à l'Institut national des sciences et techniques nucléaires. Michel Spiro, physicien expérimentateur au CEA à Saclay, prix Joliot-Curie 1983 et prix Thibaud 1985, participa à l'expérience UAI qui permit de découvrir en 1983 les bosons intermédiaires nécessaires à l'unification des interactions électromagnétique et nucléaire faible. Il est maître de conférences à l’École polytechnique.