L'homme et la coquille
Le texte de Valéry (1871-1945) qui peut nous intéresser se trouve dans Variété V, volume paru en 1944, recueil des Etudes philosophiques. Il s'intitule L'Homme et la Coquille. Dans les cinq volumes de Variété, publiés à partir de 1924, Valéry réunit des écrits en prose sur toutes sortes de sujets. Le tout est accessible dans le tome 1 des œuvres complètes (Pléiade, édition établie par Jean Hytier). Ni vraiment travail de biologiste, ni étude philosophique au sens strict du terme (malgré le titre du recueil), c'est un texte qui vise une "poésie des merveilles de l'émotion et de l'intellect". L'humble coquille (terrestre ou marine, peu importe) est propre à susciter, pour qui veut bien l'observer sans a priori et surtout en lui consacrant du temps, un étonnement sans bornes...
Mais ce n'est pas tant la coquille comme objet de curiosité qui intéresse Valéry que les circonvolutions de la pensée : en même temps qu'il nous guide dans l'observation de cette étrange concrétion calcaire, Valéry est attentif, sur un autre versant, à ce qui se passe dans l'intellect. A la fin du texte, il se débarrassera de cette coquille, qui n'est merveille que dans et par la pensée qui la pense
Pour les questions qui nous préoccupent, ce texte pourrait avoir une double portée :
- il nous aide pour continuer l'observation du coquillage, en quoi il nourrit notre questionnement et celui des enfants...
- il nous pousse à être attentifs aux ressorts de notre pensée, en quoi il rejoint aussi notre préoccupation pédagogique ; ce qui nous intéresse en effet n'est pas seulement la découverte d'un objet, mais l'apprentissage du questionnement, sous ses aspects langagiers notamment. Ainsi la méditation de Valéry ne nous éloigne pas de notre sujet : comment favoriser, dès la maternelle, non seulement les facultés d’observation, mais encore la prise de conscience, par la langue, de la pensée qui organise l’observation et la fait tendre vers son but.