Contes populaires de l'Egypte ancienne
Pharaon s'y révèle moins divin qu'on ne serait disposé à le croire, si on se contentait de le juger sur la mine hautaine que ses maîtres imagiers lui prêtent dans les scènes religieuses ou triomphales. Le romancier ne répugne pas à l'imaginer parfois ridicule et à le dépeindre dans des situations qui contrastent avec l'appareil plus qu'humain de sa grandeur. Il est trompé par sa femme comme un simple mortel, volé puis dupé à tout coup par les voleurs, escamoté par un magicien au milieu de son palais et rossé d'importance devant un roitelet nègre.
C'était la revanche du menu peuple, dépouillé et battu, sur le
tyran qui l'écrasait. Le fellah qui venait de passer par les
verges pour avoir refusé l'impôt, se consolait de sa poche vidée et de ses chairs sanglantes en s'entendant conter comment Manakhphrè Siamonou avait endossé trois cents coups de bâton en une seule nuit, et comment il avait exhibé piteusement ses meurtrissures aux courtisans.
Le Conte des deux Frères met d'abord en scène deux
frères, l'un marié, l'autre célibataire, qui habitent ensemble et
qui s'occupent aux mêmes travaux. La femme de l'aîné
s'éprend du cadet sur le vu de sa force, et elle profite de l'absence
du mari pour s'abandonner à un accès de passion sauvage.
Baîti refuse ses avances brutalement ; elle l'accuse de
viol, et elle le charge avec tant d'adresse que le mari se décide
à le tuer en trahison. Les bœufs qu'il rentrait à l'étable l'ayant
averti du danger, il s'enfuit, il échappe à la poursuite grâce à la
protection du soleil, il se mutile, il se disculpe, mais il refuse
de revenir à la maison commune et il s'exile au Val de l'Acacia :
Ànoupou, désespéré, rentre chez lui, il égorge la calomniatrice,
puis il « demeure en deuil de son petit frère.