Comment les éviter
Près de dix ans après son premier ouvrage, paru en 2002, Christian Morel reprend son enquête où il l’avait laissée et se penche sur l’émergence, au tournant des années 2000, dans des univers à haut risque, de dynamiques cognitives collectives visant à favoriser la décision éclairée. Le résultat de ses recherches, Les décisions absurdes II, se présente comme un digne successeur des Décisions absurdes. Renouant avec une marque de fabrique qui a fait ses preuves et contribué au succès de ses précédents ouvrages, son analyse est ponctuée d’une multitude d’exemples concrets aussi variés que surprenants, allant des sous-marins nucléaires aux randonnées hivernales en haute montagne, en passant par l’écriture d’une comédie par la troupe du Splendid, le cockpit autoritaire de Korean Air, l’introduction de check-lists dans les blocs opératoires, les atterrissages par temps d’orage ou un camp de prisonniers japonais. Exemple parmi cent, une étude américaine portant sur des catastrophes aériennes dans lesquelles l’erreur humaine est établie a abouti au constat qu’un accident a plus de chance de survenir quand c’est le commandant de bord qui est aux commandes. La raison à cela n’est pas que les commandants sont moins performants que leurs copilotes, c’est généralement le contraire mais que, par l’effet d’un mécanisme d’ordre sociologique, quand le pilote en fonction est le commandant et qu’il se trompe, il est plus difficile au copilote de lui dire qu’il commet une erreur et de la rectifier… Recueillant ce qu’il appelle les « métarègles de la fiabilité », synthèse de lois sociologiques et de prescriptions cognitives, comme les politiques de non punition des erreurs, la formation aux facteurs humains ou l’interaction généralisée, l’auteur dessine les contours d’un nouveau champ disciplinaire promis à un grand avenir dans une société hantée par le risque : la sociologie des décisions hautement fiables.