Colorado
On vient de remettre sous les projecteurs l'oeuvre romanesque de Louis Bromfield (1896-1956) en rééditant avec succès Précoce automne (prix Pulitzer 1926) Mississippi (boueux à souhait) et Emprise (un rien oppressant). Une oeuvre incroyablement populaire des années 20 aux années 50, puis un peu vite oubliée, et que l'on est en train de redécouvrir pour ce qu'elle fut aussi (et que l'on évitait alors de crier sur les toits) : une dénonciation carabinée de la bonne conscience et du conformisme de la vertueuse Amérique. Grandeur et décadence d'une riche famille de pionniers, dans l'Ouest du siècle passé voué à tous les appétits de conquête. Vertu et corruption règnent la main dans la main sur Silver City, la Babylone du Colorado... Bromfield, en grande forme, brosse une fresque féroce - touchante aussi - de cet Ouest turbulent où est en train de naître, arrosé d'or et de sang, le grand rêve américain. Colorado (1947) est un peu - toutes proportions gardées - son Karamazov : où les fils ont à tâche d'expier, chacun à sa façon, la folie des pères. Un western, en tout cas, qui déborde largement le cadre du genre.