Canopus dans Argo 01 - Archives : Shikasta
Ceci est l’histoire d’un monde qui pourrait être le nôtre. Depuis l’instant où apparaît la vie sur cette planète bleue, dans la moiteur des mares et des étangs, jusqu’au moment où le feu nucléaire menace d’emporter la civilisation qui a fini par se développer, voici contée l’histoire de Shikasta, jadis riche et florissante, désormais stérile, inhospitalière, « blessée à mort » – mais qui ne demande qu’à renaître.
Shikasta ? Un monde sur le berceau duquel se sont penchés deux empires galactiques antagonistes, Canopus et Sirius, qui s’en sont partagé les terres pour chacun de son côté y conduire des expériences évolutionnaires. Et c’est du point de vue des émissaires de Canopus, venus rendre compte des résultats de ces manipulations à l’échelle d’une planète, que va nous être narré le destin tragique de l’humanité – celle de notre Terre.
Au fil d’une édifiante succession de textes de formes diverses – rapports, lettres, documents d’archive, journaux intimes de shikastiens), se réécrit sous nos yeux le (véritable ?) récit de l’aventure humaine, les tâtonnements, accomplissements et erreurs d’une espèce faillible guidée sans le savoir par des puissances qui la dépassent ; des puissances dont la rivalité risque de mettre un terme prématuré à l’expérience Shikasta…
Si Doris Lessing avait initialement prévu d’offrir avec Shikasta un récit auto-suffisant, une sorte d’histoire secrète de l’humanité, le concept de civilisations extraterrestres suffisamment avancées pour influer sur le destin d’une planète entière l’a fascinée au point qu’elle est ensuite revenue à quatre reprises dans l’univers de Canopus dans Argo. Si le cycle revient à l’occasion sur le sort de notre planète (en l’abordant d’autres points de vue), l’auteure se penchera surtout sur de nouveaux mondes à divers stades de développement social et technologique – chaque roman se répondant l’un l’autre, tout en explorant de nouveaux territoires interstellaires ; au point que la série forme un genre de tapisserie s’étalant sur des millénaires.
Brassant avec talents le mythe, la fable et l’allégorie, fortement inspirée par le soufisme, Doris Lessing signe avec Canopus dans Argo : archives – qu’elle considérait comme un des sommets de son œuvre littéraire – un véritable opéra spatial questionnant la nature même de ses congénères, leur rapport à des notions aussi fondamentales que la relation à autrui, la politique, la mortalité ou la transcendance.