Album
Incontournable recueil des anecdotes du quotidien, témoin de la genèse familiale et mémoire imagée du foyer, l’album photo est une pièce constitutive de l’histoire de chacun. Guðrún Eva Mínervudóttir travaille son récit en rendant hommage à ces compilations mémorielles, et choisit de présenter, de manière chronologique, de courts textes qui photographient ses souvenirs et évoquent de courts instants de sa plus tendre enfance jusqu’à son entrée dans l’âge adulte. D’une écriture humble et précise, elle dissèque diverses situations pour en dégager des sensations merveilleusement intactes, qu’on aurait pensées indicibles.
Album aurait pu n’être qu’un exercice littéraire mais, parce qu’il est conçu avec une tendresse véritable et dénuée de mièvrerie, c’est un roman d’une incroyable douceur, où l’on s’attache aux personnages et où l’on voit se dérouler les aléas d’une mère célibataire, d’une petite fille amoureuse, et de quelques intervenants de passage. Détachée de tout narcissisme, ancrée dans la trivialité d’un quotidien islandais désargenté, Guðrún Eva Mínervudóttir raconte sa saga, explique pourquoi elle est amoureuse de Derrick, et on la comprend : c’est parce qu’il « surclassait les autres personnages de la télé comme un pur sang arabe au milieu d’un troupeau de moutons atteints du tournis ».