Mon livre surprise
La nuit comme le jour
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Le poète est un innocent : il n'a rien compris, il se risque là où il n'y a rien à gagner, où l'on ne peut que se perdre, et avec soi tout notre petit monde. Son petit air de flûte, nous le connaissons, les enfants peuvent bien se laisser prendre par lui, nous ne le suivrons pas, nous savons trop où cela mène. On n'en revient pas. Le poète n'a rien à dire, il ne sait que chanter, et encore, si pauvrement, sur un si faible instrument. Ils sont tous comme cela : "ils s'obstinent à chanter / la part manquante / qui fait l'essentiel de notre beauté". Alors que, justement, tout est fait pour nous faire oublier ce manque, pour nous le dissimuler sous l'abondance des mots et des savoirs. Les poètes n'ont de cesse de nous le rappeler, de "défaire / en nos coeurs l'idole vivace, / les fausses joies, certains bouquets / trop vite rassemblés"
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(extrait de la préface de Gérard Pfister)