Mon livre surprise
Et nous sommes revenus seuls
Pendant des années, nous ne parlons pas à la maison de nos nombreux mois de déportation, d’inhumanité dans les camps. Nous avons le sentiment que nous ne pouvons raconter à personne cet enfer, ces souffrances quotidiennes, cette vie de bêtes battues que nous avons menée pendant près de deux ans. Nous sommes traumatisés. Les rares fois où nous essayons de l’évoquer, on ne nous croit pas. N’être pas crus nous blesse terriblement. Longtemps, nous nous sommes tus.
J’ai eu envie de rompre le silence à un moment très précis, encore vif dans ma mémoire.
Un jour, j’ai entendu à la radio quelqu’un dire que les chambres à gaz n’avaient existé que pour tuer les poux. Ces mots ont été si douloureux, si pénibles à entendre que j’ai décidé, ce jour-là, de réagir.
J’ai réfléchi à la façon dont je pouvais m’adresser à ces gens-là. La réponse qui m’est venue, c’est qu’il fallait éduquer les jeunes, les informer, les éclairer. Il me fallait témoigner pour révéler à tous, au monde, aux jeunes générations, cette tragédie à nulle autre pareille, afin qu’elle ne se reproduise plus jamais.